
MÉTÉORES
Une série de performances de Frédérique Aït-Touati et Duncan Evennou
PAUL SANDBY, THE METEOR OF 1783 SEEN FROM THE EAST END OF THE NORTH TERRACE, 1783
Météores est une forme évolutive et mouvante que nous développons en série, de lieux en lieux : il s’agit d’une installation-déambulation conçue in situ, écrite pour un lieu précis, ou bien une œuvre, un bâtiment, une exposition.
Comme leur nom l’indique, les Météores sont mouvants, aériens, imprévisibles : ils interviennent partout où les sons, les mouvements et les corps peuvent se glisser, dans les coulisses et les sous-sols, sur les plateaux et dans les musées, dans les coursives, les friches, les monuments historiques ou les hangars abandonnés. Chaque lieu est traversé de sons, d’histoires, d’événements, de phénomènes, plus ou moins visibles ou enfouis. Les Météores sont là pour les réveiller, et permettre au public de les découvrir.
Une série de performances de
Frédérique Aït-Touati et Duncan Evennou
Textes : Emanuele Coccia, Frédérique Aït-Touati, Duncan Evennou
Mise en scène : Frédérique Aït-Touati
Avec : Duncan Evennou
Création musicale : Maya Boquet
Ingénieur du son : Simon Garrette
Assistante à la mise en scène : Esther Denis
Production : Zone critique cie
Co-production : Bourse de Commerce - Pinault Collection, Hangar Y, Théâtre National de Chaillot
MÉTÉORES #1 - Bourse de Commerce / 19 juin 2023
Exposition Avant l’orage
Une performance créée pour des oeuvres de Anicka Yi, Cy Twombly et Daniel Steegman Mangrané
Extraits du texte Météores #1 :
« C’est étrange cette relation qu’on entretient avec le temps - la lumière, le vent, la chaleur, le froid, la pluie, la neige… Tout dépend d’eux. Je vais me réveiller le matin, je vais ouvrir la fenêtre, et mon humeur va être conditionnée par la couleur du ciel ; la chaleur va décider de ma manière de m’habiller… l’allure de ma marche, mon chemin, tout va dépendre d’une éclaircie ou d’une averse soudaine.
Et on appelle ces événements le “temps”, ou bien la météo... mais il y avait un autre mot, plus précis, c’est ce qu’on appelait autrefois “Les météores” : les choses qui sont au-dessus ; les choses qu’on ne peut pas contrôler. Ils sont l’espace de liberté absolu de la Terre.
(...)
En réalité, l’amour c’est un météore. C’est le plus puissant, le plus fracassant des météores. C’est le climat en état d’urgence, c’est comme si on essayait de réunir le Sahara et le pôle Nord en un même lieu. Comment est-ce qu’une cabane pourrait concilier ces deux extrêmes ? Rien n’est moins naturel. L’amour n’est pas une cabane. C’est le lieu de la transformation. Un petit peu comme ce cocon. Parce que mélanger sa propre chair et sa vie avec celle de quelqu’un d’autre c’est la modifier radicalement, et c’est se transformer soi-même. »
MÉTÉORES #2 - Bourse de Commerce / 4 septembre 2023
Exposition «Avant l’orage»
Une performance créée pour une oeuvre de Hicham Berrada
Extrait du texte Météores #2 :
« Ce qui ne vit pas engendre la vie. C’est comme s’il y avait, derrière, en dessous ou dans la vie et dans le corps des vivants, quelque chose qui ne pourra jamais vivre et qui pourtant nous donne vie. C’est comme si chaque être vivant cachait en lui un abîme, le visage d’un être qui, précisément parce qu’il n’a pas de vie, est capable de tout animer. Et cette matière qui ne vit pas a construit, par elle-même et non par des influences extérieures, tout ce que vous voyez.
Il suffit d’un tout petit changement dans le dessin des atomes pour produire quelque chose d’unique, d’inédit, à partir des mêmes éléments chimiques.
Si la matière produit le vivant, alors nous sommes faits de la même matière que les pierres. Les plantes, les animaux, nous-mêmes… Nous sommes des cailloux qui ont appris à grandir, à nous transformer, à respirer. Des cailloux qui pensent. Dans nos bras, dans nos jambes, dans nos cerveaux nous couvons encore les minéraux de la terre. Notre corps n’est que de la géologie en mouvement. Un prolongement minuscule de la tectonique des plaques. »
MÉTÉORES #3 - Hangar Y / 23 mars 2024
Exposition «Prendre le soleil»
Une performance créée pour une oeuvre de Noémie Goudal
Extrait du texte Météores #3 :
« Le hangar dans lequel vous vous tenez n’est pas seulement un lieu où s’amasse une multitude d’objets, d’artefacts, de technofossiles en devenir. S’y joue un autre spectacle, invisible sous vos yeux. De même qu’à l’extérieur, des courants invisibles portaient les aéronefs et les dirigeables, des courants invisibles déchirent et parcourent tout l’espace du hangar dans lequel nous nous trouvons. Ce sont des fluides aussi puissants que ceux qui portaient ces machines volantes. C’est comme si une nouvelle couche de la terre venait de se dévoiler. Une nouvelle strate. Sauf que sa matière ne serait pas simplement faite de glaise, d’argile, d’acier, de fer, comme ce bâtiment. Il s’agit toujours de géologie, mais une géologie qui reste invisible pour l’œil.
(...) Est-ce que vous me voyez maintenant ? Ma voix n’est pas simplement un flux qui circule à travers les ondes jusqu’à vous. Elle est avant tout une vibration de l’air depuis la mezzanine où je me tiens. Je voudrais vous proposer une expérience afin de saisir pourquoi il faut toujours des artefacts et des histoires pour parvenir à nous représenter les phénomènes inaccessibles à nos sens. L’intérieur du corps humain, les étoiles… Les phénomènes invisibles ou inaccessibles ont besoin d’être matérialisés par un objet, ou par un conte, ou peut-être même plusieurs contes. Comme ces petites terres derrière moi, qui ne demandent qu’à être racontées, car chacune d’elle renferme un conte de la Terre. Elles sont comme un planétarium des théories du monde. »
MÉTÉORES #4 - Théâtre National de Chaillot / 29 & 30 mars 2024
Chaillot Expérience #7 - Anthropocène
Une performance créée pour le palais de Chaillot
Extrait du texte Météores #3 :
« La qualité de l’air a changé. L’espace dans lequel nous sommes n’est pas, celui auquel nous sommes habitués. Nous évoluons désormais dans une soupe de vagues électromagnétiques.
Vous vous demandez peut-être dans quel endroit nous nous trouvons. Nous sommes exactement sous la scène du théâtre. Vous êtes dans les dessous, dans un lieu où se stockent les gestes et les histoires. Une collection de gestes, une sorte de théâtre de la mémoire. C’est comme si toutes les histoires qui s’étaient passées sur le plateau s’étaient sédimentées ici.
Il s’agit ici d’une sorte de data center, de palais de la mémoire, de collection de nos souvenirs. Même s’il s’agit d’une autre technologie. C’est le processus de réception d’un message ou de création d’un autre.
Les murs sont faits de toutes ces strates qui sont retombées au fond. Il s’agit des dépôts, du limon des spectacles passés. »
MÉTÉORES #5 - La Manufacture de Sèvres / 27 mai 2024
Exposition « Terrella »
Une performance créée pour une oeuvre de Noémie Goudal
Extrait du texte Météores #5 :
« C’est comme s’il fallait toujours des artefacts et des histoires pour parvenir à nous représenter les phénomènes inaccessibles à nos sens. L’intérieur du corps humain, les étoiles… Les phénomènes invisibles ou inaccessibles ont besoin d’être matérialisés par un objet, ou par un conte, ou peut-être même par plusieurs contes. Comme ces petites terres derrière moi, qui ne demandent qu’à être racontées, car chacune d’elle renferme un conte de la Terre. Elles sont comme un planétarium des théories du monde.
Voilà l’expérience que je voudrais faire avec vous : pour essayer de comprendre comment la terre s’est formée, rien de mieux que de fabriquer soi-même une terre. Une petite terre, une “terrella”. C’est toute la puissance des maquettes. Pendant des siècles, les scientifiques ont utilisé la modélisation pour tenter de comprendre de quoi la terre est faite. Ils ont imaginé toutes sortes de théories : son origine, sa constitution progressive, ses différents états. Ils ont imaginé une terre structurée comme une architecture dont il faut imaginer les échafaudages. Ils ont rêvé la cause des fossiles, la naissance des montagnes, des vallées et des gouffres. »